Le Vrac, épicerie sans emballage : une littérature japonaise originale pour parler des choses humaines et tout à fait classiques

Estelle travaille dans cette épicerie après un petit passage de sa vie au Japon : elle en profite pour nous faire voyager avec le livre recueil de mangas de Junti Ito. Pour adultes ! Et nous explique ce qui la touche dans ce type de littérature pas tout à fait classique.

Pouvez-vous présenter votre commerce en quelques mots ?

Ouvert depuis neuf ans, le Vrac est une épicerie sans emballage où l’on vient avec son contenant et on choisit sa quantité de produit. Nous avons plus de 3000 références proposées : fruits et légumes, produits secs, produits d’entretien, boulangerie, produits frais…

Quel est votre livre coup de cœur ?

J’ai envie de faire découvrir « Les chefs d’œuvres » de Junti Ito, qui est un recueil de plusieurs mangas de cet auteur japonais très connu pour ces mangas d’horreur.

Parmi les histoires, on découvre celle d’un vieux vinyle qui vous hante par-delà la mort, celle de victimes d’une malédiction, d’un mannequin de papier glacé au visage monstrueux… La tête géante d’une célébrité pendue flotte dans le ciel tel un ballon, une jeune femme est traumatisée par la vision d’une épouvantable chenille ou une famille de marionnettistes aux inquiétants pantins…

Junti Ito ne fait pas de l’horreur pour de l’horreur, il fait appel à plusieurs thèmes avec des aspects très différents : psychologiques, dramatiques, etc. Il ne fait pas peur pour faire peur, il y a du sens.

Dans ses mangas, certains thèmes sont omniprésents : les personnages principaux féminins, le rapport à la forme du corps, les interactions humaines et les rapports sociaux notamment.

C’est une littérature pour adultes, contrairement à la vision classique du manga en Europe que l’on imagine dédié aux enfants. Ce livre s’adresse à énormément de personnes différentes.

Pourquoi avoir choisi cet ouvrage ?

Cet ouvrage sort de l’ordinaire et de ce que l’on voit plus classiquement. Il me rappelle également de beaux souvenirs de ma vie au Japon.

C’est une « catharsis », une façon de purger ses passions : ce terme vient du théâtre antique en Grèce, où des scènes violentes étaient jouées, comme pour les évacuer. Lire ce manga a cet effet de « purification » produit sur les spectateurs par une représentation dramatique.

Parler des monstres, des dieux, utiliser toutes ces figures symboliques et s’exprimer à travers leurs bouches à eux, permet d’expier des choses que l’on voudrait faire !

À travers ces histoires sombres, l’auteur parle de choses tout à fait humaines et banales. Grâce à ce livre, on se vide la tête, on peut expier tout ce qui serait négatif et voyager dans un autre monde avec des personnages japonais.

Quel est votre rapport à la lecture ?

Ce type de format, manga et BD, m’aide beaucoup à lire et qui me fait moins « peur » qu’un roman classique. C’est un ouvrage très visuel, mais pour un public averti tout de même.

Je lis également beaucoup de textes amateurs (sur les réseaux sociaux, diverses plateformes) : le fait de découvrir des écrits d’une personne plus proche de moi, qui peut potentiellement plus me ressembler, est intéressant. Il est enrichissant de pouvoir apprendre tout autant avec des gens qui nous ressemblent.

Dans tous les cas, il est essentiel de se respecter en lisant ce que l’on a envie de lire, sans faire de catégorisation !

Pourquoi êtes-vous commerçante partenaire de Livres dans la Boucle ?

Le responsable de l’épicerie avait présenté un livre il y a deux ans. Il trouvait sympa de proposer à l’équipe. J’ai été ravie de faire découvrir mon livre Coup de cœur à mon tour.

Indirectement, nous participons à l’événement en accueillant le public durant le festival. Avec cette mise en avant, nous participons un peu plus encore à la vie de la ville.